L’actualitéde la question noire aux États-Unis
Du community organizing à Black Lives Matter
En ce vendredi matin, une quarantaine de personnes est présente au siège de Community Coalition (une des organisations communautaires les plus puissantes de la ville) dans le sud de Los Angeles, pour participer à une rencontre exceptionnelle entre deux courants du mouvement noir américain: la nouvelle garde, représentée par les militants de Black Lives Matter, et les militants de l’organisation vieille de quatre-vingts ans, The Nation of Islam.1En jeu, la planification de leur participation à une grande manifestation prévue en octobre à Washington, qui marque les vingt ans de la « Million Man March », moment fort du mouvement noir des années 1990. Cette rencontre se veut surtout l’occasion de construire « l’unité opérationnelle » du mouvement noir, comme le dit la modératrice, membre de The Nation of Islam. Elle poursuit: « Doit-on partager les mêmes croyances ? Agir de la même façon, pour collaborer ? N’y a-t-il pas une forme de solidarité que l’on peut construire ensemble afin que ceux qui nous oppressent cessent de regarder la façon dont je m’habille, la couleur de ma peau ou mon identité sexuelle? Ce dont nous voulons parler ici, c’est du fait que les vies noires comptent [black lives matter]. »
En dépit de ces bonnes intentions, le débat sera tendu, en particulier lorsqu’un représentant de The Nation of Islam, vêtu du traditionnel costume et noeud papillon, proposera la protection de son organisation à ses « soeurs » de Black Lives Matter prises pour cibles par la police. Ces dernières – qui font de l’intersectionnalité des formes de domination et de la lutte contre le patriarcat un axe central de leur combat – pourront y voir le retour du refoulé machiste de ce militant, dont l’organisation n’est pas connue pour son progressisme en matière de genre. En dépit de styles et de cultures politiques très différentes, les deux organisations conviendront d’unir leurs forces, au moins provisoirement. Alors que l’élection du premier président noir devait marquer l’avènement d’une Amérique post-raciale, la déception qu’elle a suscitée chez de nombreux Africains-Américains, liée notamment à l’incapacité d’Obama à enrayer le cycle infernal d’assassinats par la police depuis 2013, a fortement contribué au renouveau du mouvement noir aux États-Unis. Ce nouveau cycle de mobilisation est pour partie issu d’une infrastructure organisationnelle puissante, mais restée jusqu’alors relativement discrète médiatiquement, qui oeuvre en faveur de la justice sociale et raciale dans les quartiers déshérités des métropoles américaines depuis plusieurs décennies. L’un des modes d’action qui nourrit ces groupes relève de la tradition du community organizing (organisation communautaire), qui a connu un développement important ces dernières années. Nous chercherons ici à comprendre l’actualité de cette forme d’action collective et comment le community organizing est parvenu à influencer la question raciale aux États-Unis, en contribuant notamment à l’émergence du mouvement Black Lives Matter.
Le pouvoir de la communauté
Né dans les années 1930 à Chicago à l’initiative de l’activiste Saul Alinsky, le community organizing a connu un essor important aux États-Unis au cours des trente dernières années. Il apparaît comme l’une des formes, minoritaire, politisée et critique, de mobilisation de la société civile. Le community organizing cherche à accroître, au niveau local, le pouvoir des classes populaires en les mobilisant selon des méthodes précises et avec pragmatisme. Sans être un théoricien, Alinsky a développé une philosophie de l’action collective. Il défend en particulier une conception réaliste du pouvoir: tous les moyens sont bons pour favoriser l’émancipation des classes populaires et le changement social. En effet, le pouvoir ne se donne pas: il se prend. Alinsky promeut une conception active de la transformation sociale: celle-ci ne naîtra pas des contradictions objectives du système, mais de la mobilisation et du pouvoir accumulé par ceux qu’il appelle les have-nots (« les démunis »). Seul le rapport de force (par le scandale, la ruse ou le bras de fer avec les dominants) permet d’obtenir des avancées substantielles, ce qui suppose de constituer des organisations puissantes capables de traiter d’égal à égal avec les institutions.2Ce processus d’organisation collective est supposé déboucher sur l’empowerment et l’accroissement des capacités d’action des dominés: « Aider les gens en leur déniant une part importante dans l’action ne contribue en rien à leur émancipation.»3
Au-delà de l’influence d’Alinsky, le développement du community organizing a été favorisé par la multiplication des sources de financements publics et privés, liée au démantèlement de l’État providence américain à partir des années 1980 : de nombreux services sociaux autrefois assurés par l’État sont transférés à la société civile.4Les associations qui se revendiquent du community organizing assurent parfois certains services – soutien scolaire, réinsertion des détenus, orientation pour les sans-papiers –, mais l’activité des organisations concerne surtout la mobilisation des habitants des quartiers pauvres dans le cadre de campagnes pour la « justice sociale et raciale ». La montée en puissance du community organizing s’est encore renforcée avec l’avènement de Barack Obama, qui a valorisé son expérience d’organizer à Chicago dans les années 1980. Son élection a ainsi contribué à donner une visibilité à une tradition militante pourtant ancienne,5dont les méthodes sont désormais si populaires – certains considèrent qu’elles ont permis l’élection du premier président noir – qu’elles ont été récupérées par une partie de la droite conservatrice.6Cette labilité du community organizing indique qu’en le détachant de son projet politique et en en faisant une simple méthode de mobilisation, on peut l’adapter à des projets idéologiques très différents.
«Aider les gens en leur déniant une part importante dans l’action ne contribue en rien à leur émancipation.» (Saul Alinsky)
Une agglomération de onze millions d’habitants comme Los Angeles compte une quinzaine d’associations qui se réclament ou mettent en oeuvre les principes du community organizing.7Elles rassemblent plusieurs milliers de membres, majoritairement issus des milieux populaires (la moitié vit sous le seuil de pauvreté) et de groupes « minorisés » (les Noirs et les Latinos représentent 80 à 90 % des participants). Cette capacité de mobilisation de publics que peinent à toucher les structures militantes traditionnelles tient notamment à un travail des salariés dédiés à la tâche, qui recrutent en porte-à-porte, lors de réunions d’appartement ou à la sortie de la messe.
Disposant d’un statut associatif, les organisations communautaires ne constituent-elles pas néanmoins un oxymore? L’association caractérise en effet une logique d’engagement volontaire, éventuellement contractualisé, dans l’objectif de promouvoir une cause ou un intérêt partagé. Elle renvoie dès lors davantage à la société qu’à la communauté, telles que les définit le sociologue Ferdinand Tönnies.8À l’inverse, la communauté correspond d’abord à des formes de liens de proximité, denses et hérités plus que choisis. Aux États-Unis, la notion fait en effet d’abord référence au quartier: les relations de voisinage, la fréquentation d’une église ou les modes de sociabilité communs liés à une culture partagée. Quand ces liens sont trop délités, ces organisations cherchent à les reconstituer, considérant qu’ils sont la condition d’une mobilisation durable. Elles s’appuient donc sur les relations communautaires ordinaires pour promouvoir des revendications sociales.9
Affinités électives et division du travail
Les organisations communautaires mènent généralement plusieurs campagnes de front sur des sujets variés: construction de logements sociaux et lutte contre la gentrification (l’embourgeoisement des quartiers populaires), accès aux transports en commun, augmentation du salaire minimum, conditions d’éducation dans le ghetto, etc. L’un des enjeux importants est la mobilisation contre l’abandon des écoles publiques des quartiers pauvres par les pouvoirs publics, qui conditionnerait les enfants à l’échec scolaire, à la délinquance, puis à l’incarcération. Les écoles publiques apparaissent de façon croissante – en particulier pour les jeunes garçons membres de groupes minorisés – comme l’antichambre de la prison10(the school-to-prison pipeline). Des associations en Californie mènent depuis plusieurs années des campagnes visant l’accroissement des financements publics en faveur de l’éducation et une transformation des pratiques disciplinaires dans les écoles afin de les orienter dans un sens moins répressif,11ainsi que des campagnes en faveur de la réinsertion des anciens détenus, très nombreux en Californie.12
Black Lives Matter souligne l’intersectionnalité des dominations raciales, sexuelles et genrées.
Le combat contre la criminalisation des minorités est donc au coeur du travail du community organizing. Il existait dès lors des affinités électives évidentes avec le mouvement Black Lives Matter, qui émerge à l’été 2013 à la suite de l’acquittement du meurtrier du jeune Africain-Américain Trayvon Martin en Floride. Plus précisément, le mouvement est né à l’initiative de plusieurs community organizers californiennes, en particulier Alicia Garza – directrice de l’organisation Power à Oakland qui mobilise les employées de maison souvent d’origine étrangère – et Patrisse Cullors, directrice d’une organisation qui lutte contre l’incarcération de masse. D’autres dirigeantes – en particulier au sein des organisations Dream Defender et Hands Up United – sont issues de la fédération de community organizing Acorn. Certaines ont également une expérience syndicale, la filiation étant directement revendiquée par Alicia Garza elle-même: « Les gens pensent que nous nous soucions d’enjeux identitaires [identity politics]. La vérité est que nous faisons ce que le mouvement syndical a toujours fait: organiser les gens d’en bas.13» Lors de la première convention annuelle du mouvement, à l’été 2015, une session de formation était ainsi consacrée à la méthodologie du community organizing, celle-ci devant contribuer à structurer et pérenniser un mouvement qui se veut très souple. Il est traversé par cette tension: d’un côté, il se veut un mouvement décentralisé et démocratique, de l’autre, il cherche à se pérenniser en structurant localement des organisations, qui bénéficient pour cela du soutien de fondations philanthropiques.14
En dépit de cette généalogie, il existe des divergences importantes entre le community organizing et le mouvement Black Lives Matter. Ce dernier est mené par des militantes de la classe moyenne, très éduquées, alors que le community organizing cherche à mettre en avant des dirigeants issus des catégories populaires. Ces sociologies distinctes reflètent les sensibilités contrastées de ces mouvements: alors que le community organizing se concentre sur l’articulation entre classe et race – en cherchant à mobiliser les plus pauvres qui appartiennent souvent à des minorités –, Black Lives Matter souligne l’intersectionnalité des dominations raciales, sexuelles et genrées, pour mettre en avant les formes de domination que subissent les femmes, les transgenres et les homosexuelles noires, au détriment parfois des questions de stratification sociale. Ces différences ne sont pas seulement théoriques, elles se reflètent aussi dans les interactions quotidiennes de ces organisations: le langage châtié des militantes de Black Lives Matter – on laisse le choix aux participants de se présenter comme un « il » ou un « elle » (preferred gender pronoun) – détonne avec le ton plus direct et moins intellectualisé propre aux organisations communautaires. Enfin, leurs répertoires d’action diffèrent: alors que le mouvement Black Lives Matter place la lutte pour l’affirmation de la valeur des corps et des vies noires sur un plan symbolique et idéologique, le community organizing cherche toujours à définir un objectif précis afin d’obtenir des avancées rapides, bien que parfois modestes, pour les personnes mobilisées. À ce titre, le community organizing se tient dans une position médiane au sein du champ de l’antiracisme américain. Black Lives Matter en constitue la branche la plus radicale et a connu des frictions avec les organisations héritières du mouvement des droits civiques des années 1960 (tels la National Association for the Advancement of Colored People ou le National Action Network), plus modérées.15Ces dernières, portées par des classes moyennes noires, cherchent à entretenir le dialogue avec les institutions (et notamment la police) et reprochent à Black Lives Matter son intransigeance, qui viendrait mettre de l’huile sur le feu d’une situation déjà tendue. À l’inverse, les dirigeants de Black Lives Matter considèrent que la stratégie historique d’ascension progressive d’une élite politique noire a échoué à transformer significativement les conditions de vie de la grande majorité des Africains-Américains.16Si même l’avènement d’un président noir n’a pas permis de remettre en cause le racisme systémique, d’autres méthodes doivent être employées. Entre ces deux pôles, le community organizing parvient à mettre en place des coalitions mouvantes selon les sujets. C’est ainsi qu’une forme de division du travail politique implicite s’est instaurée autour de la question des pratiques policières discriminatoires et de la réforme du système judiciaire.
Une voix pour les ghettos?
L’émergence du mouvement Black Lives Matter s’est traduite par la mise à l’agenda médiatique national de la question des violences policières. Elle a contribué à ouvrir les opportunités politiques sur cette question, ouverture dont ont pu bénéficier les organisations communautaires effectuant un travail plus souterrain. Sans y participer directement, les militants de Black Lives Matter favorisent l’avancée des revendications d’organisations communautaires défendant des mesures précises: fin des peines plancher qui contribuent à remplir les prisons, dépénalisation du cannabis dans certains États, encadrement des pratiques policières, etc. Ainsi, toujours en Californie, un référendum d’initiative populaire, porté par une coalition d’organisations communautaires – la proposition no 47 –, est passé en 2014, permettant de requalifier certains crimes en délits, ce qui a conduit à la libération de détenus emprisonnés pour des méfaits mineurs. La population carcérale a ainsi décru de 9 % en 2015.17Les fonds économisés – près de 68 millions de dollars annuels – devraient en outre être utilisés pour développer des programmes de prévention et de réinsertion sociale et professionnelle pour les anciens détenus. En septembre 2015, cette coalition a également obtenu, suite à des mois de pression, la signature d’une loi à l’échelle californienne – dite « AB 953 » – assurant la transparence et le dénombrement des arrestations et des altercations entre police et population. Cette revendication visait en particulier à documenter les contrôles au faciès de la police (racial profiling), pour lesquels aucun chiffre officiel n’était jusqu’alors disponible. Alors que ce projet de loi était défendu depuis plusieurs mois par ces organisations et des élus démocrates progressistes, le gouverneur Jerry Brown a fini par accepter de le signer, sous la pression d’un Parti démocrate sentant qu’il ne pouvait faire l’impasse sur cette question.18Concernant la question raciale, Barack Obama n’a pas été entièrement inactif durant son mandat. Sa grande réforme, celle de l’assurance santé, aura des effets à long terme sur la régulation sociale qui, s’ils sont présentés d’un point de vue universel et non racialisé par l’administration, bénéficieront aux plus pauvres, et notamment aux Africains-Américains. Pendant sa présidence, le taux d’incarcération a baissé pour la première fois depuis les années 1960. Suite aux mobilisations de Black Lives Matter, l’administration Obama a également lancé des procédures d’enquêtes sur les pratiques policières dans vingt-trois villes du pays, afin de repérer d’éventuels dysfonctionnements.19Il a également mis en place une réforme visant à remettre en cause le recours aux prisons privées. Bloqué par un Congrès conservateur, il n’a cependant pas pu faire davantage, et les déceptions qui en ont découlé ont nourri l’émergence de ce nouveau mouvement des droits civiques. Celui-ci n’aurait pas connu la même vigueur si les espoirs à l’égard d’Obama n’avaient été si importants. Le mouvement n’aurait cependant pas connu un tel développement s’il n’avait pu s’appuyer sur un réseau d’organisations communautaires structuré depuis longtemps. Le community organizing ne se concentre pas uniquement sur les questions raciales ou les violences policières. Il cherche à promouvoir les intérêts des classes populaires, tels qu’elles les formulent elles-mêmes. L’exemple de la question raciale illustre son efficacité et la capacité de ces organisations à donner une voix aux habitants des quartiers populaires. Si des émeutes ont éclaté en 2014 à Ferguson et en 2015 à Baltimore, à la suite de l’assassinat de jeunes Noirs par la police, celles-ci ont vite laissé place à l’organisation collective. Tout l’enjeu du community organizing, en effet, est d’offrir une voix, une représentation, un canal d’expression à la colère et au sentiment d’injustice des habitants des ghettos. Mais pour que celui-ci ne soit pas qu’un pis-aller, il requiert – au regard de la défiance qu’exprime la population à l’égard de toute forme d’engagement – des effets concrets et rapides. Comme le répètent fréquemment les community organizers rencontrés sur le terrain, « les pauvres n’ont pas le temps d’attendre le “grand soir” ». Les petits pas vers l’égalité qu’ils obtiennent dessinent néanmoins l’horizon d’un État social plus égalitaire. Alors que certaines organisations communautaires sont accusées de contribuer au démantèlement de l’État providence par l’offre de services autrefois assurés par l’État,20celles qui s’inscrivent dans la philosophie du community organizing cherchent à l’inverse à interpeller les élus afin de reconstruire les bases d’un système social véritablement redistributif et égalitaire.
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Il n’est pas certain cependant que les réformes ainsi obtenues soient suffisantes pour transformer structurellement les conditions de vie dans les ghettos américains. Au regard de la profondeur de la marginalisation sociale et de la criminalisation qui touchent les habitants, ces mobilisations ne pourront peser de façon décisive que si elles dépassent l’échelle locale pour influencer les politiques publiques au niveau national. Le mouvement Black Lives Matter a connu une audience nationale immédiate grâce à l’efficacité des réseaux sociaux, mais il ne parviendra à influencer le jeu politique de façon durable que s’il réussit à structurer des organisations puissantes. Alors que ses dirigeants répètent fréquemment qu’il s’agit « d’un mouvement et non d’un moment », le passage de l’un à l’autre requiert la construction de liens plus solides avec un community organizing au style pourtant bien différent. La capacité de ces différents groupes à s’ouvrir à des pratiques et à des méthodes distinctes est l’une des conditions d’émergence de coalitions puissantes. L’issue de la campagne présidentielle, où les positions les plus conservatrices ont dominé, permettra certainement à ces groupes de se fédérer derrière des adversaires communs, davantage encore qu’ils n’ont pu le faire sous la présidence Obama. L’un des enseignements principaux que retiennent les militants des huit dernières années est en effet que, sans une pression constante sur les élus, il est peu probable que ces derniers respectent leurs engagements et adoptent une ligne progressiste. La démocratie d’interpellation que certains appellent de leurs voeux de ce côté-ci de l’Atlantique21semble avoir encore de beaux jours devant elle aux États-Unis.
The Nation of Islam touche surtout des musulmans africains-américains, majoritairement membres des catégories populaires, la population arabe, plus aisée, étant moins active en son sein. Née dans les années 1930, l’organisation a connu un essor important dans les années 1960 et a contribué à l’émergence du mouvement du Black Power, dont Malcolm X était l’un des dirigeants. Encore active aujourd’hui, sous la direction charismatique de Louis Farrakhan, elle développe une approche panafricaniste parfois qualifiée de « nationalisme noir ». Voir Caroline Diamond-Rolland, Black America. Une histoire des luttes pour l’égalité et la justice (xixe-xxie siècle), Paris, La Découverte, 2016.
Ce qui distingue pour partie le community organizing de la tradition du « développement communautaire», qu’il a pourtant inspiré, qui repose sur une approche plus consensuelle.Voir Jacques Donzelot, Catherine Mével et Anne Wyvekens, Faire société. La politique de la ville aux États-Unis et en France, Paris, Seuil, 2003. Sur ces distinctions, voir Julien Talpin, Community Organizing. De l’émeute à l’alliance des classes populaires aux États-Unis, Paris, Raisons d’agir, 2016.
Saul Alinsky, Être radical [1971], Bruxelles, Aden, 2011, p. 123.
Michael Lipsky et Steven Rathger Smith, Nonprofits for Hire: The Welfare State in the Age of Contracting, Cambridge, Harvard University Press, 1993.
“Community Organizing Never Looked so Good”, The New York Times, 12 avril 2009.
Le Tea Party s’inspire en effet de son organisation horizontale et de ses techniques de formation de dirigeants. Voir Michael P. Leahy, Rules for Conservative Radicals: Lessons from Saul Alinsky, the Tea Party Movement, and the Apostle Paul in the Age of Collaborative Technologies, New York, C-Rad Press, 2009.
Dans la mesure où cette recherche visait notamment à analyser les dynamiques d’action collective nées des émeutes, l’essentiel du travail de terrain s’est déroulé dans l’agglomération de Los Angeles auprès d’organisations nées à la suite des émeutes qu’a connues la ville en 1992. À ce titre, les phénomènes observés ne sont peut-être pas entièrement identiques dans d’autres métropoles américaines.
Ferdinand Tönnies, Communauté et société. Catégories fondamentales de la sociologie pure [1887], Paris, Puf, 1944.
Du fait de la ségrégation raciale et socio-spatiale, les communautés de voisinage rassemblent souvent des individus appartenant aux mêmes groupes minorisés. Mais l’objectif des organisations communautaires est de construire des ponts par-delà ces frontières symboliques.
Un homme noir avait en 2010 six fois plus de chances de se retrouver en prison qu’un homme blanc, et deux fois plus qu’un Latino. Avec près de 2,3 millions de détenus pour une population de 315 millions d’habitants, les États-Unis ont un des taux d’incarcération les plus élevés au monde. Voir Michelle Alexander, The New Jim Crow: Mass Incarceration in the Age of Colorblindness, New York, The New Press, 2010.
Elles ont notamment obtenu le passage du référendum d’initiative populaire no 30 en 2012, qui s’est traduit par l’octroi de 6 milliards de dollars annuels supplémentaires pour financer les écoles des quartiers pauvres, dégagés par une augmentation de l’impôt sur le revenu des contribuables les plus fortunés.
Elles ont notamment oeuvré en 2013 au passage d’une loi, à l’échelle californienne, supprimant la case indiquant des peines de prison passées sur les formulaires d’embauche des administrations publiques – campagne Ban the Box – ce qui s’avérait souvent rédhibitoire pour les anciens détenus et favorisait la récidive.
Jelani Cobb, “The Matter of Black Lives”, The New Yorker, 14 mars 2016.
Voir Keeanga-Yamahtta Taylor, From #Blacklivesmatter to Black Liberation, Chicago, Haymarket Books, 2016. Outre la formation de ses initiatrices, Black Lives Matter peut s’appuyer sur l’infrastructure organisationnelle du community organizing. Ainsi, à Los Angeles, alors que la section locale de Black Lives Matter rassemble quelques dizaines de personnes, ses réunions sont accueillies dans les locaux d’organisations communautaires alliées, qui sont aussi régulièrement présentes lors des manifestations contre les violences policières organisées par Black Lives Matter.
Voir par exemple Angel Jennings, “Longtime L.A. Civil Rights Leaders Dismayed by In-your-face Tactics of New Crop of Activists”, Los Angeles Times, 30 octobre 2015.
Francis Shor,“‘Black Lives Matter’ Constructing a New Civil Rights and Black Freedom Movement”, New Politics, XV-3, été 2015.
Voir Mia Bird et al., How Has Proposition 47 Affected California’s Jail Population?, San Francisco, Public Policy Institute of California, mars 2016.
La Constitution californienne prévoit que, pour être adopté, un projet de loi doit obtenir la majorité à l’Assemblée et au Sénat de Californie, puis la signature du chef de l’exécutif, le gouverneur, qui dispose d’un droit de veto (qui ne peut être dépassé que par une majorité des deux tiers des deux chambres).
Voir Brandon M. Terry, “Racial Politics After Obama”, Dissent, été 2016.
Incite! Women of Color Against Violence, The Revolution Will Not be Funded: Beyond the Nonprofit Industrial Complex, Cambridge, South End Press, 2007.
«La démocratie d’interpellation : l’exemple de Pas sans nous », Mediapart, 27 octobre 2015.
Published 21 March 2017
Original in French
First published by Esprit 2/2017
Contributed by Esprit © Julien Talpin / Esprit / Eurozine
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